Enlevée par sa famille pour avoir fait du porno
Majeure, elle avait pris la liberté de tourner dans des films X. Ses proches ont réagi en l’enlevant.
Dans la tradition musulmane et la culture turque, les valeurs de la famille sont essentielles. Et lorsqu’un membre de la communauté se trouve en danger, tout est mis en œuvre pour lui porter assistance. Une famille turque arrivée en France dans les années 70 vient d’en connaître l’expérience en tentant de remettre la cadette âgée de 22 ans dans le droit chemin.
Après des études d’esthéticienne à Nancy et deux essais en qualité de vendeuse, cette dernière a secrètement choisi de rejoindre la région parisienne pour devenir actrice de films pornographiques. Réaliser des photos coquines aussi, repérées par un ami de la famille au cours de l’été 2008.
Avisés de la situation, les parents, repartis au pays depuis la mi-juin, ont écourté leurs vacances en tentant de prendre contact avec leur fille, en vain. L’inquiétude grandit et une partie de la famille se rend alors à Nancy mais trouve porte close. Après intervention des sapeurs-pompiers, l’appartement présente un « grand bazar » avec des préservatifs et des tenues vestimentaires particulières. Mais toujours aucune trace de la locataire.
Celle-ci sera finalement localisée dans un Etap Hôtel d’Aubervilliers, dans la Seine-Saint-Denis, après un coup de fil donné du portable de la mère, dans lequel figurait un numéro mystérieux. Bingo ! Au bout du fil, un photographe donnant l’information tant attendue.
Des conseils de famille se réunissent alors au quotidien pour tenter de porter secours à la « chouchou » du père, qui s’est retrouvé devant le tribunal correctionnel de Bar-le-Duc, avec l’une de ses filles et deux gendres, pour répondre du délit d’enlèvement.
« La décision a été prise ensemble. Nous ne sommes pas partis dans l’intention de la ramener mais de la raisonner », confie-t-il à la barre en présence d’un interprète.
Le 10 septembre, la fille, « horrifiée par les photos nues de sa sœur », et les deux gendres se rendent dans le 93. En l’absence de l’intéressée, le président du tribunal lit son audition. Oui, elle a bien eu des contacts avec un producteur de films X sur Nancy. Oui, elle a accepté les tournages « de son plein gré ». À l’arrivée du trio familial vers 15 h, elle indique avoir refusé de quitter l’hôtel. Elle n’en descend qu’à 23 h, croyant être enfin seule. Mais sa sœur et ses deux beaux-frères la conduisent « de force » dans la voiture, « la main sur la bouche », direction Ligny-en-Barrois.
« Pour nous, ce n’était pas un enlèvement. On voulait la sortir du milieu où elle était tombée », explique avec une évidente sincérité la prévenue au tribunal. Les deux jours qui suivent, la cadette les passe chez ses parents. Souvent cloîtrée dans sa chambre, où elle reçoit un violent coup de pied dans les côtes de la part d’un de ses frères, très énervé, mais dont l’attitude est condamnée par la famille.
« Votre fille avait-elle la possibilité de sortir librement sans être accompagnée ? », demande au père le président Brisquet. « Elle n’est jamais sortie seule, on ne voulait pas qu’elle reparte. C’était dans l’unique but de la protéger ». Les trois autres prévenus acquiescent.
Le 13 septembre, un aller-retour encadré à Aubervilliers est effectué pour que la cadette reprenne ses affaires personnelles. À l’aide d’un second téléphone portable en sa possession, elle parvient en cachette à exposer sa situation, par SMS, à une « connaissance professionnelle ». Qui alerte aussitôt le commissariat d’Aubervilliers.
Le parquet de Bobigny sollicite l’intervention des gendarmes de Ligny-en-Barrois qui se rendent le 16 septembre au domicile des parents.
Le père, maçon à la retraite, n’a jamais eu affaire à la justice. Il explique que « l’activité de sa fille lui était inconcevable », craignant pour « l’honneur de sa famille ».
Dans sa plaidoirie, le procureur de la République Yves Badorc a fait preuve d’une grande pédagogie, insistant sur le « décalage entre les faits et la perception de ceux-ci par les prévenus, qui ont bien commis une infraction pénale. » Et d’argumenter : « Une personne a bien été emmenée contre son gré pour rejoindre le berceau familial et la privation de liberté au domicile des parents est bien établie. Elle était libre car elle était majeure. Son comportement est peut-être répréhensible dans la morale familiale mais elle ne se trouvait pas dans une situation de danger qui aurait légitimé une action de ses proches. À 18 ans, les choix de vie sont ceux d’une personne et non de sa famille ».
Les réquisitions du parquet seront reprises à la lettre par le tribunal qui a condamné chacun des quatre prévenus à 3 mois de prison avec sursis. « La loi est la loi », a conclu la fille, qui n’a plus de contact avec sa sœur. « Elle vit à Paris, je crois qu’elle garde des enfants... »
Source L'EstRépublicain
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